Journaliste de formation, Dominic Arpin est animateur et producteur de télévision. Amateur de nature et de plein air, il découvre depuis les dernières années une nouvelle façon de retrouver l’équilibre, une enjambée à la fois. Résumé d’un entretien inspirant et authentique ayant eu lieu au Strøm spa nordique de Mont-Saint-Hilaire, au cœur de la nature boréale.
Bonjour Dominic. Nous vous avons connu dans Vlog dès 2007 comme passionné de technologie, mais dernièrement, votre amour du plein air a aussi rayonné, notamment dans Van aventure, une émission dans laquelle vous avez sillonné le Québec en van. Comment est né cet intérêt pour le plein air ?
« Je suis né dans un rang dans le village de Saint-Ours, près de Sorel-Tracy, à 45 minutes de Montréal. Mon père étant agriculteur, j’ai grandi sur une ferme laitière, entouré de champs à perte de vue et d’une forêt où je pouvais aller m’amuser quand je voulais, comme je voulais. La nature a donc toujours fait partie de moi d’une certaine manière.
Puis, avoir 40 ans m’a secoué; j’ai réalisé que je vieil- lissais. Je me regardais aller et je n’aimais pas ce que je voyais. J’étais inactif, je prenais du poids, je fumais, je ne mangeais pas bien, je buvais trop, trop souvent, je faisais la fête… la quarantaine m’a forcé à me regarder dans les yeux et à me demander où je m’en allais avec tous ces excès. Tranquillement, je me suis mis à m’entraîner, à courir, à faire du CrossFit, à bouger à l’extérieur. J’ai tellement aimé l’effet que ça a eu sur mon corps, mais surtout sur ma tête. Je suis quelqu’un de très anxieux, sujet à des crises de panique, et j’ai compris que pour retrouver un équilibre, j’avais besoin de la nature et du sport. »
Avez-vous eu un modèle, une inspiration dans cette prise en charge de votre santé ?
« Oui, et elle était devant moi tout ce temps-là : c’est ma blonde. Ma conjointe Annie, c’est une grande sportive, elle faisait de la randonnée et courait des marathons quand je l’ai rencontrée. À l’époque, rien de tout ça ne m’intéressait. J’étais à fond dans le travail, je voulais m’établir, avoir une carrière. Un jour, peu avant mes 40 ans, Annie participait au marathon de Montréal et je suis allé la soutenir. Une heure avant qu’elle ne finisse la course, j’étais déjà à la ligne d’arrivée à l’attendre, et cette heure-là m’a complètement chamboulé. Je pleurais en regardant les gens arriver, parce que je voyais dans leur visage la satisfaction, l’accomplissement, la fierté, la douleur. C’est là que je me suis dit “OK, moi aussi, je veux vivre ça”. Quand ma blonde a finalement franchi la ligne, je la trouvais tellement impressionnante, elle était une superwoman à mes yeux. C’est comme ça que j’ai commencé à courir, et je suis chanceux d’avoir eu son soutien, ses encouragements. Elle m’avait tou- jours poussé à emprunter cette voie-là, mais c’était la première fois que le message passait vraiment. »
Est-ce que le dépassement de soi, inhérent à la course à pied, contribue à votre bien-être ?
« Oui et non. J’ai longtemps été “compétitif”; je cherchais à améliorer ma vitesse de course, à aller toujours plus vite. Maintenant, je travaille mon endurance, j’essaie de m’améliorer sur la distance parcourue. Ce que j’aime dans ce défi, qui se matérialise dans les ultramarathons ou la course en sentier, c’est justement le fait que ce soit long. Je passe beaucoup de temps avec moi-même, et en courant dans la nature, je ne me sens pas coupable d’arrêter. Contrairement à la course sur route, je prends des pauses, je bois, je mange, je peux même changer mes chaussures. Il y a un côté plus décontracté dans ce genre de course qui me ressemble beaucoup plus, puisque je fais du sport pour me débarrasser du stress dans ma vie. Quand j’ai réalisé qu’en voulant être performant à tout prix dans mon sport, je me rajoutais du stress, j’ai changé ma façon de faire. »
Qu’avez-vous retiré de l’immersion en nature vécue dans le cadre de Van aventure ?
« Ça a été pour moi une forme d’équilibre. Quand je suis à la maison, le divan m’attire, c’est comme un aimant. Il est très confortable et je pourrais facilement m’y installer et vider Netflix de tout son contenu. J’aime naturellement le confort, l’oisiveté.
Ce que la van m’a apporté, c’est tout le contraire. Je me départis de tous les accessoires de la vie courante et je passe la nuit dans un camion avec mon chien, sur le bord d’un lac avec des maringouins qui m’empêchent de dormir. Avoir goûté à ça, ça a complètement changé ma vie. Quand je suis revenu chez moi après le premier été de tournage, je trouvais ma maison ridiculement grande. Je me suis mis à faire un ménage incroyable, j’ai donné un tas de trucs à des amis et à des organ- ismes, et je suis d’ailleurs encore aujourd’hui dans ce processus-là. Je n’appellerais pas ça du minimalisme, car il y a paradoxalement une partie de moi qui aime beaucoup consommer, mais n’empêche que cette expéri- ence en van m’a permis de revenir à l’essentiel. Ne pas savoir où je me réveille le matin parce que la veille il faisait noir quand je me suis stationné, me lever en même temps que le soleil et les oiseaux, ouvrir la porte de la van et laisser mon chien aller courir comme bon lui semble pendant que je me prépare un café, ne pas avoir de réseau cellulaire ni de connexion Internet… Avant, je ne comprenais pas trop le “trip” derrière la vanlife, mais maintenant oui, et je ne peux pas revenir en arrière. Ça demande de s’adapter à son environne- ment comme jamais, de se fondre dans le décor, et c’est ce que je trouve fantastique. »
Avez-vous fait des séjours en van l’hiver?
« Oui, j’en ai fait l’hiver dernier et j’ai vraiment adoré. C’est sûr que ça nécessite plus de logistique, n’ayant ni eau courante ni toilette, avec le froid qui s’infiltre rapidement dans le véhicule quand on y entre ou qu’on en sort. Aussi, on n’y pense pas, mais l’hiver, il fait noir vraiment tôt ! Comme il est difficile d’être très long- temps dehors à -30 °C, je me retrouvais à 16 h dans ma van, et je n’en ressortais pas avant le lendemain matin. Il faut aimer lire ou avoir des séries téléchargées d’avance ! C’est un autre mode de vie l’hiver. Honnête- ment, je m’en sers plus pour me rapprocher de certains centres de ski, j’arrive la veille et je repars après ma journée de ski. Mais pour partir plusieurs jours en van l’hiver, il faut aimer un peu la misère. »
Vous avez mentionné le ski… quel est votre rapport avec les sports d’hiver ?
« Personnellement, je compte les dodos avant qu’il neige. L’hiver est ma saison préférée, et de loin. Il y a 10 ans, je n’aurais jamais dit ça, car je voyais juste les désagréments de cette saison, comme la plupart des gens. Mais ça a changé quand j’ai commencé à profiter des joies de l’hiver et à réaliser la chance qu’on a au Québec. Je fais du ski alpin, de la raquette, de la randonnée alpine, du ski de fond, du fat bike, du patin, même de la glissade sur neige. Et juste aller marcher dans la neige avec mon chien me procure un tel bonheur… Le silence qui règne, la pureté de l’air… Depuis que je fais de la photo un peu plus sérieusement, je trouve aussi que l’hiver est photogénique. Ça fait de belles couleurs, les réflexions du soleil en début de journée ou quand le soleil se couche créent des panoramas exceptionnels. Et j’ajuste les sports que je pratique en fonction du niveau de neige : quand il y a une grosse bordée, je pars en raquette ou en ski de randonnée pour profiter de la poudreuse du matin. »
Crédits photos :
Martin Bouffard (photo en ski sur butte de neige)
Dominic Arpin (photo devant la van)